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mercredi 7 octobre 2015

L’enseignant qui m’a marquée par Amédine MAS

En cette rentrée 1960 je fais mon entrée au Collège d’ Argelès, la cour des grands pour la petite fille de 10 ans que je suis. Je découvre un univers stupéfiant, le professeur d’ Espagnol qui ne s’adresse à nous qu’en espagnol jusqu’à la moindre rature qu’il nous corrige de sa voix tonitruante et rauque à la fois. Une terreur l’idée de faire une erreur. Etonnons nous que je parle couramment l’espagnol !
Je pourrais en parler car il m’a marquée.
Cependant ce n’est pas de lui que je vais m’entretenir.
C’est du professeur de mathématiques. Jeune, mince sautillant sans cesse, très nerveux, tonique et bon professeur.
Monsieur Serre devait avoir 35 ans , d’un dynamisme à couper le souffle et sans doute passionné par son métier. Je l’ai eu pendant 3 année sur 4 il m’aimait beaucoup et s’obstinait à dire à mes parents « C’est une matheuse » alors que j’avais des résultats déplorables. Il avait raison dans le sens où j’ai une logique très mathématique qui ne s’est jamais démentie avec le temps.
Il m’aimait beaucoup et pourtant il m’a giflée. La première –et dernière- gifle d’un professeur dans ma carrière d’élève.
Quand on en connaît le motif cette gifle est aussi incongrue que comique.
Non je n’étais pas dissipée, ni bavarde. Pas davantage mauvaise élève ou étourdie. Mes cahiers étaient bien tenus, je n’étais pas irrévérencieuse . Je n’avais rien qui justifiât pareil châtiment. Mes notes moins que moyennes n’y étaient pour rien. Et Alors me direz-vous ?

Figurez-vous qu’un jour il s’est mis en tête de nous apprendre à lire un pied à coulisse.
Vous connaissez toutes le pied à coulisse et savez toutes le lire, je suppose !
Et bien je n’ai pas su : j’avais beau retourner dans tous les sens cet objet de mesure, me pencher sur ces tas de petits traits et sur ces chiffres qui se mélangeaient, voire se superposaient, rien n’y faisait. Je retournais l’objet en tous sens, terrifiée comme s’il eut du me dévorer, toujours rien. Le métal grisâtre me brûlait les doigts et les rainures dansaient devant mes yeux hagards. Rien ! Finalement, excédé, le professeur me gifla à la volée. Ce qui ne m’apprit pas davantage à utiliser l’engin.

Ironie du sort : savez-vous quand pour la première fois de ma vie j’ai eu besoin d’utiliser un pied à coulisse ? A 63 ans lorsque je décidai de me lancer dans le bricolage. Je l’utilise et, comble de l’ironie, je ne sais toujours pas le lire…car je n’ai pas besoin de sa lecture pour mon utilisation !

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