Dans
un mas du Roussillon entouré de mimosas et baigné par le soleil on
vient d’enterrer la grand-mère et la famille se réunit pour le
partage, tout se passe dans la sérénité et le respect mutuel. Le
fils ainé prend les meubles pour garnir sa maison d’été et il
dit
-
Comme ça quand vous viendrez passer les vacances chez moi nous
penserons aux parents-.
Il
emporte tout mais hélas l’armoire est trop grande et elle ne rentre
pas dans la maison ; il la dépose dans le hangar et il
l’oublie.
Sa
fille était très proche de mamie Gabrielle et elle se dit que
c’est dommage de le reléguer ainsi, elle revoit sa grand-mère le
nettoyer avec tendresse et le regarder d’un air triste.
Chaque
fois qu’elle vient en vacances elle y dépose ses objets les plus
précieux, c’est son jardin secret ; il y a la bague faite de
bris d’herbe que son premier fiancé lui a offert à sept ans, les
poèmes qu’elle écrit et que n’ose pas montrer ni à sa
meilleure copine, il y a aussi sa première fiche de paye.
Aujourd’hui
le ciel est gris et elle traine une mélancolie inexpliqué, du coup
elle va se réfugier dans le hangar pour parler à sa grand-mère.
Elle ouvre l’armoire et l’odeur de lavande qui s’en dégage
emplit le local et son cœur. Elle aperçoit un petit bout de papier
qui dépasse d’une planche, intriguée elle le prend et voit que
c’est une lettre comme elle n’en a jamais vu, avec des cœurs et
des roses, surprise elle la lit.
Ma
chère Gabrielle,
Tu
ne peux pas t’imaginer comme je suis content de savoir que nous
attendons un bébé ; mon ciel s’illumine dans cette barbarie
de la guerre. Ne t’inquiète pas c’est avec beaucoup de bonheur
que je m’occuperai de vous : si j’ai une permission nous
nous marierons tout de suite, sinon ça sera chose faite quand je
rentrerai.
Je
pense à vous deux et je t’embrasse très fort
Ton
José
Ouf…
que d’émotion !
Mais….
Il y a encore une autre lettre… voyons…
Mademoiselle
Gabrielle Durand
Nous
sommes au regret de vous annoncer le décès du soldat José Pla, il
est mort en héros mais étrangement avec le sourire aux lèvres.
La
Patrie est fière de lui.
Quand
elle a fini la lecture les larmes coulent sans fin sur son pâle
visage.
-Mamie,
je suis la continuation de ton amour, tu as donné à ton premier
enfant, mon père, le prénom de José ; je comprends maintenant
ta tristesse quand tu passais près de l’armoire. Je te jure qu’il
ne me quittera jamais, je t’aime mamie.