Toute ressemblance avec des lieux ou des personnages
existants n’est pas pure coïncidence ; bien au contraire tout existe dans
la réalité.
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Ce n’était pas encore le temps de la poudrerie, à Aristot. J’avais remarqué ce petit village , bien
avant tout cela, un jour, depuis l’autre côté de la vallée, en grimpant vers
d’austères et éblouissantes montagnes. Je m’étais promis…Ce nid d’aigle
m’intriguait. Oui, un vrai nid d’aigle, accroché sur des pentes abruptes, un
miracle d’équilibre.
C’est dire si la route grimpait et virevoltait, de lacets en
lacets , fort étroite. Au temps de la poudrerie,
je ne me fusse point aventurée sur ce trajet. Toutefois il avait bien draché quelques jours auparavant. Les
bas côtés de la route en portaient encore les stigmates. Que voulez-vous, ce
n’était pas un lieu ordinaire que ce village perdu, accroché par ses griffes de
pierre aux flancs de la sierra.
Un peu plus tard, ancrée sur ce perchoir de rocs, je
décidai, dans la noire nuit automnale de parcourir ce village étrange où même
un tap tap ne se fut point hasardé.
Les quelques
lumerottes blafardes me guidaient dans des ruelles qui n’en étaient pas,
juste sentiers d’herbe et de rocs où
veillaient de nombreux chats à la mine chafouine.
Il eut été vain que je cherchasse en ce lieu un quelconque dépanneur qui m’eut servi quoi que ce
fût ; pas le moindre espoir de
ristrette et ce fut d’ailleurs préférable pour profiter de la plénitude du
sommeil en ces lieux.
La soirée était bien avancée et je débouchai sur la rue
principale, guère mieux éclairée par d’éparses lumerottes, lorsque je le vis. Je fus surprise par cette silhouette
immobile, appuyée sur sa canne. Il m’interpella brusquement , dans cette langue
étrangère un peu rauque que heureusement, je comprends et je parle. Il crut,
m’avoua t’il, que c’était sa sœur qui arrivait par le sentier. Il l’attendait,
elle venait de là bas, au loin, dans la nuit étoilée de cette fin d’automne
glacée. Alors nous engageâmes la conversation. C’était un très vieil homme qui
attendait sa vieille sœur, comme ils durent s’attendre souvent dans leur
enfance. Pourtant ce ne fut pas son enfance qu’il évoqua, toujours appuyé sur
sa canne, la mine chafouine , le
regard tourné en dedans, vers ses souvenirs. Du temps où le berger vigousse qu’il était courait la nuit
dans les montagnes pour assister une vache qui devait vêler. On eut pu le croire un peu fada, s’il n’avait évoqué avec passion
son métier d’autrefois.
« ah, me dit il dans sa langue, c’est sûr que j’étais
un peu fada… »
Et ses yeux luisants riaient dans l’obscurité. « Mais
tu sais, conclut-il, tandis qu’une noire silhouette se profilait au bout de la
rue, j’étais un homme simple…pas comme ce champanié
de Manuel, ajouta t’il, en désignant du bout de sa canne une maison
imposante, altière, un brin ostentatoire.
Je n’en appris pas davantage. Il se levait déjà pour aller
au -devant de sa sœur et je repris mon chemin par les sentiers escarpés , mi
escaliers, mi venelles où veillait toujours la dizaine de chats à la mine chafouine sous la lueur blafarde des lumerottes…
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Oui un bien étrange voyage hors du temps et hors du monde en
ce village au nom évocateur, Aristot. Là bas en catalogne, aux confins de la
Cerdagne.
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